un musée dans la caverne

un musée dans la caverne

Amadeus de Milos Forman.


            Le titre de ce chef d’œuvre indique deux choses : il va être question d’une part, d’un jeune homme nommé Wolfgang Amadeus Mozart, d’autre part, de Dieu lui-même qui constitue la deuxième syllabe du titre ama-deus, que l’on pourrait ainsi traduire : aime Dieu ! à un « m » près…Cette injonction, Salieri – compositeur officiel de la Cour – l’a prise trop longtemps au sérieux pour accepter qu’un grossier personnage se fasse le porte-parole de Dieu à travers sa musique. Dès lors, comment une musique aussi exceptionnelle a-t-elle pu émaner d’un être tel que Mozart ? Premier concerto à 4 ans, première symphonie à 7 ans et premier opéra à 12 ans…Un curriculum vitae qui ne laissera pas de faire des jaloux, et surtout un. Salieri raconte comment sa rencontre avec Mozart a bouleversé sa vie. Salieri est ce qu’on appelle un compositeur doué de talent, un talent acquis par un travail besogneux, tandis que Mozart, doté d’un génie sans précédent, semble littéralement avoir été inspiré par la voix de Dieu. Mais alors le génie n’exigerait-il aucun travail ? Si Mozart a certainement été favorisé par la nature, si ce n’est par Dieu comme le croit Salieri, il a pourtant dû actualiser son génie pour produire ses œuvres. Le père de Mozart l’a initié très tôt à la musique, le transportant d’une Cour impériale à une autre, pour faire montre de ses exploits. Bien plus qu’un singe savant, Mozart devint un compositeur de génie capable de s’approprier une partition en un rien de temps et d’en créer une avec autant de dextérité. Aussi, Salieri voit d’un mauvais œil l’arrivée de Mozart à la Cour de Vienne. Ce gamin hilare, ce coureur de jupons indiscipliné, capricieux, égoïste et sans scrupule, n’a pas l’envergure d’un grand compositeur aux yeux de Salieri. Lui qui a tant espéré laisser son nom dans l’histoire de la musique se voit éclipsé par cette « créature obscène ». Persuadé que Dieu a fait don à Mozart de son génie musical pour l’humilier, Salieri nourrit une jalousie paranoïaque. Il renonce à son dévouement envers Dieu pour se consacrer à un projet plus funeste : la destruction de sa créature bien-aimée, Mozart.

Salieri est typiquement l’homme du ressentiment, tel que Nietzsche le conçoit ; le ressentiment est une forme d’amertume ressentie à l’égard des créateurs (et pour Salieri, du Créateur et de sa créature). Insatisfait de ce qu’il crée, Salieri devient un homme faible, réactif, qui ne se réalise que dans l’opposition à l’homme créatif qu’est Mozart. Mais Salieri n’est pas dupe de ce qu’il est, puisqu’il se dépeint lui-même comme un être « médiocre ».

Dès lors, jusqu’où Salieri est-il capable d’aller pour satisfaire son sinistre dessein ? Il engage une jeune servante qu’il envoie anonymement offrir ses services à Mozart et à sa femme pour pouvoir espionner le jeune compositeur à son insu. Il peut ainsi dévoiler à la Cour que Mozart prépare un opéra italien à partir de la pièce française de Beaumarchais intitulée Le mariage de Figaro, pièce formellement censurée par l’empereur de Vienne, qui y voit un moyen d’attiser les conflits de classe. Si l’empereur accepte de faire fi des conventions et de laisser ce jeune homme passionné produire son opéra, il ne laissera pas de bâiller lors de la représentation. Salieri se réjouit de cette mauvaise réception et en profite pour composer un nouvel opéra qui séduit l’empereur et amuse Mozart. Salieri continue toutefois d’entretenir un double jeu avec Mozart pour se rapprocher de lui, et surtout de son œuvre. La jalousie éprouvée par Salieri à l’égard de cet élu de Dieu, qu’incarne pour lui Mozart, se révèle plus ambiguë qu’il n’y paraît : si Salieri exècre l’homme, il éprouve une fascination sans borne pour sa musique, et c’est précisément pour cette raison qu’il va assister à tous les opéras de Mozart. Il tente de dissocier l’homme de l’œuvre. Or, la coexistence en un même homme du génie musical et de la trivialité lui est insupportable : Mozart ne mérite pas de posséder un tel génie. Si donc le désir de tuer Mozart, un compositeur dont il admire l’œuvre, peut sembler contradictoire, il s’explique par l’injustice que ressent Salieri : il préfère sacrifier l’œuvre et l’auteur plutôt que de devoir supporter plus longtemps l’existence de cet être hybride.

Il va donc saisir la première occasion pour persécuter Mozart. A la mort de son père, Mozart se met à composer des opéras de plus en plus sombres, dans lesquels son père figure sous forme de spectre. Salieri y voit un moyen de tourmenter Mozart, en exploitant l’emprise que continue à avoir son défunt père sur son œuvre. Il se procure alors le même déguisement que celui porté par son père lors d’une soirée costumée, afin d’intimider Mozart ; il lui commande ainsi un requiem, tout en demeurant anonyme. Mozart s’attèle à la tâche avec quelques difficultés, et sombre peu à peu dans la folie. Dépassée par les événements, sa femme part avec son enfant, et c’est alors que subissant la réprimande de sa belle-mère, Mozart a l’idée de composer La flûte enchantée et de créer ainsi le personnage de la reine noire ! Lors de la représentation de cet opéra, Mozart fait un malaise qui annonce sa mort imminente. Salieri l’accompagne chez lui, et insiste pour l’aider à achever sa dernière œuvre. Ironie du sort, Mozart composera son requiem, sur son lit…de mort.

 

Lolita

 

 



26/08/2012
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 8 autres membres